Implicite, savoirs communs partagés et présentation de soi (I)

Dans une revue scientifique (Lectures), on peut lire ceci :

 

"Philosophe, linguiste diplomate et ministre, Wilhelm von Humboldt prit également le temps de fonder, en 1810, l'Université à Berlin qui porte aujourd'hui son nom. (...) Significativement, aussi illustre en Allemagne que son naturaliste de frère Alexander, Humboldt est peu connu de ce côté-ci du Rhin." (Je souligne)

 

(Martinache, I. (2009) , « Franz Schultheis, Marta Roca i Escoda, Paul-Frantz Cousin, Le cauchemar de Humboldt. Les réformes de l'enseignement supérieur européen », Lectures [En ligne], mis en ligne le 09 janvier 2009, consulté le 14 juillet 2017. URL : http://lectures.revues.org/710)

 

En réalité, en Allemagne, Humboldt est loin d'être aussi illustre que le prétend l'auteur. Mercredi dernier (12 juil.), plusieurs de mes étudiants ne connaissaient pas Humboldt. Je penserais même que le philosophe est aussi connu d'un côtés que de l'autre du Rhin, mais par le même milieu académique et humaniste.

 

Selon Vion (1992), le savoir partagé comprend "les savoirs de nature encyclopédique qui constitue le fondement culturel d'une communauté" (p. 84). Il les appellent également "savoir quotidien" ou "savoir intuitif" et les opposent au "savoir scientifique". On peut parler plus simplement de "savoir ordinaire" en opposition au savoir scientifique.

 

L'implicite

Pourquoi Humboldt serait-il connu en Allemagne ? D'où vient la construction de cette connaissance ordinaire allemande ? Quel image de l'autre et quel objet cherche-t-on ainsi à construire ? Ne cherche-t-on pas plutôt à faire croire que, du côté français, il s'agit d'une grave lacune ? L'auteur ne cherche-t-il pas, implicitement en construisant un objet imaginaire, à se présenter comme un expert, un érudit, un membre de l'élite, quelqu'un qui sait ce qu'il faut ou ne pas connaître et qui a accès non seulement à une connaissance allemande, mais à la connaissance de ce que les Allemands connaissent ?